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 Source : Liberation (28/06/2002)    Source : Le Figaro (01/07/2002)
[Articles du 01/07/2002] - [ Periode : 07-2002 (62 articles)] - [ Source : Le Figaro (22 articles)]

Article paru le 01/07/2002 - Cet article est la propriété du journal ou société : Le Figaro

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Pour Georges Paillas, chef d'atelier mis en examen «Il n'y a jamais eu de chlore dans le sas du hangar»


Il y a quinze jours, douze salariés de l'usine AZF de Toulouse, dont le directeur, étaient mis en examen pour «homicide involontaire» suite à l'explosion. L'un deux, Georges Paillas, a accepté de répondre aux questions du Figaro. La justice reproche à ce chef d'atelier d'avoir autorisé un employé d'une société sous-traitante à déposer une benne présumée contenir 600 kilos de DCCNa (un produit chloré qui explose au contact du nitrate d'ammonium) dans le sas du hangar 221, un quart d'heure avant le drame. Une version que l'intéressé conteste vigoureusement.

LE FIGARO. – Quelle était votre fonction au sein de l'usine ? Georges PAILLAS.

– J'ai travaillé pendant trente-huit ans au service expédition. Ces trois dernières années, j'occupais le poste de chef d'atelier. Avant d'en arriver là, j'ai gravi tous les échelons. Je connaissais tous les recoins de mon secteur, rien ne m'échappait, y compris dans le hangar 221, dont j'étais responsable.

Le matin du 21 septembre, vous avez autorisé un employé d'une entreprise sous-traitante à déposer une benne de nitrate d'ammonium dans le sas de ce bâtiment. Or, les policiers supposent qu'il s'agissait en fait d'un produit chloré, le DCCNa, qui a la particularité d'exploser au contact du nitrate d'ammonium…

Ce garçon est effectivement venu me voir le matin en me disant qu'il devait rapatrier une benne de produits vers le hangar 221. Il m'a expliqué qu'il s'agissait d'un GRVS (NDLR : grand récipient vrac solide) de 600 kilos de nitrate agricole qui était percé. Je lui ai dit de vérifier que c'était bien du nitrate, et que, si c'était le cas, il pouvait le déverser dans le sas du hangar. C'est ce qu'il a fait.

Comment pouvez-vous être sûr qu'il s'agissait bien de nitrate d'ammonium, et pas de DCCNa ?

Parce qu'entre le nitrate agricole ou industriel et les produits chlorés, les sacs sont tout à fait différents. Dans le premier cas, il s'agit de sacs à une seule anse, que l'on remplit par une buse, tandis que les seconds sont conditionnés dans des GRVS à quatre anses, qui doivent être maintenus ouverts avec quatre crochets. Il est impossible de remplir un GRVS de nitrate avec du DCCNa, et vice versa, car les deux systèmes sont incompatibles. Donc, il ne pouvait pas y avoir de confusion possible.

Avez-vous contrôlé vous-même la nature de la cargaison ?

Non, j'ai fait confiance à 100 % à cet employé ; c'est quelqu'un de fiable, qui travaillait depuis neuf ans dans l'usine et qui était extrêmement sérieux. Au point que les collègues lui reprochaient parfois d'être trop sourcilleux. Si je vous mets 600 kilos de DCCNa sous le nez, vous allez prendre les jambes à votre cou tellement ça sent mauvais. Les gars qui conditionnent les produits chlorés portent un masque, une combinaison et des gants. Si ça avait été du DCCNa, il s'en serait aperçu, d'autant qu'il a pelleté les 600 kilos du produit à la main dans la benne qu'il a ensuite acheminée dans le hangar 221.

Les policiers disent que pendant votre garde à vue vous n'avez pas été capable de faire la différence entre ces deux produits…

On m'a effectivement présenté des flacons contenant chacun une dizaine de grammes de produits chlorés ou de nitrate en me demandant de les reconnaître juste en les regardant. Il s'agissait de produits très dénaturés, qui ne ressemblaient plus à rien. J'ai donc dit que je voulais bien me prêter au jeu, mais sous toutes réserves. Lorsque j'ai ouvert un flacon et que je l'ai mis sous le nez du policier, il a reculé de deux mètres en arrière ; il était clair que c'était bien du chlore. J'espère qu'ils n'ont pas oublié de l'écrire dans leur rapport.

Les personnels qui sont passés dans le sas quelques minutes avant l'explosion auraient dû sentir des émanations…

Mais il n'y a jamais eu de chlore dans le sas du 221. Et puis, le sas où le DCCNa est censé avoir été déposé n'a pas explosé. Alors, qu'on m'explique ! Après avoir affirmé, au départ, que l'épicentre de l'explosion se situait au milieu du tas principal, les experts judiciaires disent maintenant que la détonation est partie du sas, à au moins vingt ou trente mètres du centre du cratère. C'est à n'y rien comprendre.

La justice vous soupçonne d'être l'un des responsables de cette catastrophe. Comment vivez-vous cette situation ?

Comme une seconde explosion. Ça me mine, je ne pense qu'à ça du matin jusqu'au soir. Surtout que je suis mis en cause sans preuve, uniquement sur des suppositions. Je ne m'attendais vraiment pas être mis un jour en examen. D'autant que je suis un miraculé, j'ai été gravement blessé, et, parfois, je me dis qu'il aurait mieux valu que je sois mort.

Propos recueillis par Marc Mennessier


 Source : Liberation (28/06/2002)    Source : Le Figaro (01/07/2002)

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