La justice a convoqué, pour les mettre en examen, neuf représentants des victimes de l'Erika et de l'usine AZF de Toulouse qui avaient occupé, en décembre, la propriété de la famille de Thierry Desmarest, PDG de TotalFinaElf.
« La démarche des victimes était avant tout symbolique, il s'agissait d'attirer l'attention sur les retards d'indemnisation, plaide Me Emmanuel Ludot, avocat d'une des personnes poursuivies. La plainte déposée par la famille Desmarest pour deux tags et trois bouteilles de vin me paraît dérisoire et révélatrice d'un certain état d'esprit. » Les 11 et 12 décembre dernier, au moment où se déroulait à Paris le débat national sur les risques industriels, des manifestants – parmi lesquels le navigateur Eugène Riguidel et le rameur Jo Le Guen – avaient occupé le château que le patron de la compagnie pétrolière possède, avec d'autres membres de sa famille, à Montigny-la-Resle, dans l'Yonne. Ils avaient démonté portes et fenêtres, et tagué les mots « Erika » et « AZF » sur les murs de l'ancienne demeure. Puis, ils s'étaient installés dans la bâtisse durant un jour et une nuit avant de quitter les lieux de leur plein gré, non sans avoir dégusté quelques bonnes bouteilles de vin puisées dans la cave.
Le 13 décembre, la famille Desmarest avait déposé une plainte auprès du tribunal de grande instance d'Auxerre pour « violation de domicile et destruction de biens appartenant à autrui ». Le 18 mars, Claudine Philippe, juge d'instruction à Auxerre, a sollicité la mise en examen des « squatters », qui encourent une peine maximale de cinq ans de prison. Huit représentants des victimes de la marée noire causée par l'Erika – Xavier Lambion, Rozenn Le Douridour, Jo Le Guen, François Lelong, Alain Malardé, Robert Prigent, Eugène Riguidel, Marie-France Tréport, sont convoqués par les juges d'instruction de Lorient et Brest. La neuvième personne, Claire Poinas, porte-parole des victimes de l'usine AZF, se verra notifier sa mise en examen par un juge de Toulouse. A ses yeux, « la situation semble totalement disproportionnée ». « Nous allons être mis en examen, dit-elle, pour quelques tags qui peuvent facilement s'effacer, une vitre cassée involontairement et quelques bouteilles alors que, dans la catastrophe de Toulouse aucune mise en examen n'a encore été prononcée. C'est cela, la justice à deux vitesses. »
Les protestataires affirment n'avoir commis aucune dégradation intentionnelle. Ce n'est pas l'avis de la justice qui, dans une convocation pour première comparution, estime qu'ils ont « volontairement dégradé et détérioré » le château et se sont « introduits et maintenus dans le domicile à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ». « Nous ne sommes ni des cambrioleurs ni des voleurs, dément Jo Le Guen. D'ailleurs, nous n'avons pas été interpellés à la fin de l'occupation. Au contraire : le colonel de gendarmerie a bu un verre de vin rouge avec nous. » Thierry Desmarest, estimant que cette affaire relève de la sphère privée, n'a pas souhaité réagir aux mises en examen annoncées.
Muriel Frat
(Pour rappel, la diffusion d'articles est soumise à
des règles strictes. Je vous invite à consulter celles-ci en cliquant
directement sur le logo en en-tete de page pour accéder au jounal propriétaire
de cet article. En ce qui concerne le site sur lequel vous vous trouvez http://www.lesnews.org,
les demandes ont été faites ou sont en cours. Pour plus d'informations,
sur le drame de Toulouse, je vous invite également à consulter
les articles disponibles ou dossiers sur les sites multimédias de ces
journaux, accessibles également en cliquant via le logo du journal assoccié
en en-tête)