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 Source : Tout Toulouse (17/10/2001)    Source : Tout Toulouse (17/10/2001)
[Articles du 17/10/2001] - [ Periode : 10-2001 (334 articles)] - [ Source : Tout Toulouse (78 articles)]

Article paru le 17/10/2001 - Cet article est la propriété du journal ou société : Tout Toulouse

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Quand le phosgène joue à cache-cache


Photo © Tout Toulouse Contrairement aux recommandations de l'administration, la SNPE ne veut pas détruire son stock de 69 tonnes de phosgène. L'entreprise préfère le vendre. Le transport s'effectue par camion jusqu'à la gare de triage de Saint-Jory, puis par train.

Faut-il détruire sur place ou évacuer de la plateforme chimique sud de Toulouse le phosgène, ce gaz dont la réputation mortelle remonte à la guerre 14-18 ? Les experts eux-même sont divisés.

Vendredi 5 octobre, le mot d'ordre à la préfecture était encore à la destruction de l'ensemble des stocks des usines Tolochimie et SNPE, à l'exception de quelques centaines de kilos déjà conditionnés en containers prêts au départ. Le préfet, Hubert Fournier, et le directeur de la Direction régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement, Alain Dorison, précisaient même que les 9 tonnes détenues par Tolochimie seraient détruites " dans une quinzaine de jours ". Aucun calendrier n'était avancé pour la SNPE, Alain Dorison souhaitant s'assurer au préalable de l'état d'une " colonne d'abattage " nécessaire à l'opération. Vendredi 12 octobre, changement de programme. Dans un communiqué sybillin, la préfecture se contentait de signaler que " l'industriel a pris la décision d'évacuer la totalité du phosgène présent sur le site, ce qui a d'ores et déjà commencé ".

Pourquoi un tel revirement ? A la SNPE, on évoque désormais un problème matériel sur un générateur de vapeur, ce qui nécessiterait quatre semaines de délai. Dans le même temps, 9,5 tonnes de phosgène ont déjà été évacuées vers de mystérieux clients qui souhaitent garder l'anonymat. Le directeur général adjoint de la SNPE, Bernard Fontana, refuse de donner la liste de ses clients et le prix de vente du phosgène, mais il assure que " ce n'est pas une affaire économique majeure ". A ses yeux, le transfert du stock est la solution " la plus sûre et la plus rapide ".

A la Drire, les ingénieurs restent dubitatifs. Ils estiment que la SNPE n'est pas capable de détruire ses stocks. Surtout depuis qu'ils ont découvert qu'il y avait davantage de phosgène dans des conteneurs blindés de toute taille que dans les deux citernes enterrées : 69 tonnes au total, dont seulement 17 dans les cuves souterraines. La SNPE assure qu'elle peut écouler la totalité de son stock d'ici le 10 décembre. A la Drire comme à la préfecture, on voudrait une évacuation plus rapide. Tout dépend en fait de la capacité d'absorption du " marché ". Le problème est d'autant plus complexe que les quantités commercialisées sont généralement faibles. Le dernier client de la SNPE a acheté 150 kilos.

Pour chaque envoi, il faut redoubler de précautions. Comment ces transports à risques sont-ils organisés ? A la SNPE, on assure que la procédure est parfaitement maîtrisée depuis le temps que l'usine procède à ces envois. Avant l'accident d'AZF, le responsable de la logistique de SNPE chimie, Marc Patry, expliquait dans une publication de la SNCF, Frêt Magazine , que la SNPE avait " fait le choix du fer pour les conditions de sécurité qu'il offre " . M Patry ajoutait même que pour le phosgène, " nous nous sommes interdit la route " . L'évacuation des produits toxiques s'effectue par trains, mais aussi par camions. C'est le cas du phosgène de la SNPE. Ce gaz mortel n'est pas conditionné en citerne, mais dans des conteneurs blindés et banalisés.

Pourtant, c'est bien un convoi exceptionnel routier, escorté par des motards, qui a sorti les premiers conteneurs de phosgè ne de l'usine, une dizaine de jours après l'explosion. Depuis, ce sont toujours des camions qui sortent le phosgène. Ils appartiennent à la société Rouch, qui disposent de chauffeurs habilités pour cette délicate mission. " On a toujours fait comme ça et on n'a jamais eu le moindre problème " explique Patrick Alm, basé à Saint-Alban, à l'agence de l'entreprise. Suivant un itinéraire précis, sans jamais avoir le droit de s'arrêter, le camion transporte sa cargaison enfermée dans un conteneur banalisé. Seule l'étiquette codée du phosgène, UN 1076 selon la nomenclature internationale des produits dangereux, permet d'identifier son contenu. Terminus à Fenouillet, rue des usines. Là, la semi-remorque est placée sur un wagon au chantier intermodal de Novatrans, la filiale de la SNCF spécialisée dans le ferroutage.

" Habituellement, on l'expédie de nuit avec un train de marchandises vers la vallée du Rhône " indique M Malet, le responsable de Novatrans à Fenouillet, qui indique avoir aussi fait partir une cargaison en direction de Paris depuis l'accident du 21 octobre. Ceux qui s'inquiétaient de savoir que les trains évacuant le chlore, l'ammoniac ou l'acide nitrique de la plate-forme chimique, passaient par la gare Matabiau, n'ont aucune raison de souffler. Le train de nuit en direction de la vallée du Rhône passe toujours par la gare. " Tant qu'on n'aura pas la rocade ferroviaire de la vallée de l'Hers, on y sera bien obligé " plaide Daniel Vidal, le directeur régional Frêts de la SNCF. Ce curieux mélange de transport routier et ferroviaire en pleine ville vient rappeller que la " bombe " décrite sur la plate-forme chimique sud de Toulouse possède des ramifications dans toute l'agglomération. Le cas du phosgène est d'autant plus exemplaire que le transport de ce gaz est soit interdit, soit sévèrement réglementé dans le monde. Tous les spécialistes s'accordent à limiter au maximum le transfert et le stockage du phosgène. L'usine SNPE de Toulouse fait figure d'exception. Entre transfert et élimination, une troisième solution a été envisagée : redémarrer l'usine le temps d'écouler le stock de phosgène, qui n'est qu'un outil de synthèse pour la fabrication de produits chimiques entrant dans la composition de médicaments ou de l'AKD, un traitement hydrofuge du papier fabriqué par la société Raisio, également présente sur le site toulousain. Mais le préfet n'a pas voulu revenir sur son arrêté de suspension d'activité des usines de la plate-forme chimique. Aujourd'hui, Bernard Fontana assure qu'il n'était pas question de forcer la main du préfet pour obtenir le redémarrage de l'usine.

ph. E. Grimault


 Source : Tout Toulouse (17/10/2001)    Source : Tout Toulouse (17/10/2001)

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